lundi 13 avril 2009

contre-lettre à Henri Meschonnic

Marseille, le 13 avril 2009

henri vous disiez on ne sait pas ce qu’on transmet je répondais on ne sait pas
ce qu’on reçoit l’amitié
ne tient pas dans les noms
même dans les mains qui se tiennent dans les voix qui se mêlent l’amitié
déborde et c’est elle qui donne des mains à nos voix pour l’étreinte c’est elle
qui donne de la voix quand nos mains s’envolent dans vaste oui le ciel que l’amitié invente dans les têtes
et nous pouvons accueillir l’inconnu puisque c’est lui
qui fait une porte où il n’y a pas de porte
un voir de la vie où il y avait le mur aveugle de l’époque

henri aimer parler emportent c’est faire connaissance dans la surdité du savoir ce qui sourd
vient de loin l’avenir sur le bout
de la langue les lèvres font vivre et revivre un livre
et rire le rêve elles portent le réel celui
qui n’est que s’il est
ce dont de la parole nous nous échappons
ce qui nous échappe et c’est nous
à chaque mot et le réel
elles le donnent nos lèvres à qui
sait quitter ce qu’il sait
ce que l’on croit acquis
et nos pour toujours commencent toujours dans
chaque bonjour du jour

à lodève l’été dernier vous nous disiez on n’est jamais
seul et je l’entends encore tellement de bouche
en bouches que c’est vrai que ça continue
d’être un premier soir la table les rires
continuent de l’éclairer
une fontaine dans les paroles buissonne l’eau
de la vivante évidente rencontre et toujours
c’est nos premières fois
les mots ne peuvent nous retenir ils nous tirent
par la manche mais on est déjà
dans le monde tout autre qu’ils mettent au pluriel quand les mots
conjuguent entre eux le verbe
aimer
et on laisse
s’effilocher fil à fil on laisse filer
les mots qui voudraient
nous habiller en dimanche on marche vers
toujours plus nue
la nudité

on n’est jamais seul on continue
de naître et n’être rien
que cette marche à l’inconnu à l’aveugle
à tâtons puisque nos mains ne peuvent pas
ne pas se trouver on marche
à bouche que veux-tu nos questions s’amusent
à gorge déployée

on a fait nos cartons le monde
on le déménage en poète
on le déshabille de ses définitions on le déshabitue
de ses calendriers on l’infinit on a
de minuscules résonances pour faire trembler
le décor qui le majusculait et mettait sur nos cartes
vous êtes ici
au passé

avec ce qui sourd on fait
ce qui s’ouvre n’en finit pas
de s’ouvrir et vivre sens
dessus dessous en mettant cul
par-dessus tête la belle assurance
la suffisance des Assis
des ministres du cult
urellement correct

on parle la bouche pleine
de ce qui n’existe pas
encore et encore et enfants
on s’insuffit de toute la vie c’est pour ça
qu’un infini fleurit sur nos lèvres
nous enracine d’avenir lave l’oubli
avec la mémoire le soir
luit et jouit d’être le matin de la nuit
chaque jour on apprend dans le noir à voir
ce qu’on ne voit pas c’est la vie
cette nuit noire qu’on tire du puits et qui rince les visages
de ce qu’on croyait être avec
tout ce qu’on ne sait pas qu’on devient le corps
naissant à voix nue

on dit bonjour
a ceux qui vivent leur bonne nuit

je vous dit bonjour henri parce que ça commence
ça ne fait que commencer conjuguer penser
à l’intempestif présent
ce qui sourd c’est ce qu’on pressent que ça presse
que quelque chose bouge c’est le sens et le sens
c’est ce qu’on ne peut pas prédire c’est la rumeur d’avenir dans ce qu’on dit
mais on sent qu’il y a urgence et la rumeur court
plus vite que nous on respire on respire l’air libre au jour
le jour
à la vie la vie
on en rit
on en rit pour toujours

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