vendredi 14 décembre 2012

Architecture de l'orage

Philippe Païni
Architecture de l'orage, Ed. Contre-allées, 2012





Comment fixer l'orage    question ouverte: l'architecture de l'eau et de l'air suspendus dans l'inquiétude du tourbillon remplace la pierre - oxymore vivant, comme tout oxymore, de sa virtualité  fragile,  contraste entre figé et mouvant, entre quelque chose où l'on habite et quelque chose qui nous habite, entre l'architecture faite pour habiter et le tourbillon qui ne sait qu'arracher. Un tourbillon  né de contraires qui se confrontent: dès la première page,  le lecteur aura compris: "plonger" et "s'envoler" se confondent dans le souffle suspendu. Quelque chose qui balaie tout, qui unit terre et ciel dans un mouvement du corps qui nage "jusque dans / le feuillage des arbres on ne fait plus de différence/ entre plonger et /un envol" mais en même temps, quelque chose de très stable - comme une architecture - alors que l'oeil du cyclone veille à ce que la fragilité d'un orage qui passe nous laisse des signes inscrits –  comme ces moments d'orage pris dans un réseau  englobant.
Mais l'orage "se construit" d'une page à l'autre:  l'état liquide avec les images associées  s'amplifie :"on mêle nos corps à tant d'eau", "geste qui sans le savoir/ jette sa lumière dans le puits de/ l'avenir proche le déjà/ présent";  "la même fontaine bouillonne", "quand on jette /une pierre dans l'eau"; "on tire de loin du noir l'eau/ qui étanchera la soif/ de chaque feuille"; "une pluie irrigue un rien d'herbe et loin/ on entend déjà que l'avenir / est un océan qui gronde"; petit à petit, l'orage naissant au fond d'un puits ou dans cette fontaine qui bouillonne envahira tout, comme une "rumeur" grandissante qui unit l'infime (de la feuille) à l'immensité (de la soif), tout en inscrivant l'infiniment grand dans l'infiniment petit.
Cette tension mouvementée semble tenir ensemble des contraires: finitude/ infini, pierre/herbe, premières fois/dernières fois, rivière qui naît/perte. Mais on sent, étrangement, que tout se sépare de tout. Le "même" se sépare de soi et pourtant "on s'attache aux formes changeantes/ du même"; cet univers brisé en contraires est secoué par le tumulte cosmique.
Et enfin, "tout" semble  pris dans ce tourbillon étrange - mouvant et immobile à la fois: on retrouve ce mot au commencement de plusieurs poèmes: 'de tout ce dont être/si souvent prévisibles nous sépare"; "tout ce qui pressent  que l'orage vient se dépêche"; "les arbres coiffent le monde/ mais tout bouge dans l'air et le silence même"; "toute rivière qui naît connaît/l'instant de sa perte": "tous les mots qu'on a jetés aux poissons"; "on donne au présent/tout le passé".
Tout comme l'eau dans l'orage, les sons se métamorphosent eux aussi: le "o" de l'"orage " se fait "aube",  "eau", "sol", "orbe",  "dévore" et tout … "déborde". Cette voyelle traverse les images et leur prête la cohérence particulière de l'écoulement. La densité du poème y réside. L'écoulement du temps aussi.
Le mouvement, la métamorphose envahissent également la coupure des vers qui libère parfois une double lecture; et le vers "déborde": "une voyelle  d'aube/ en aube tisse/ nos jours". C'est à la fois "une voyelle d'aube" et cette voyelle qui passe "d'aube en aube", qui renaît transformée mais toujours la même, qui porte l'orage de poème en poème.
Enfin, vient "le pas d'après" qui contient un vécu énigmatique, un orage secret qui fleurit en livre de poèmes. Cet "après-orage"  qui est du sable, même pas du sable: rien que son "savoir".
Restent la soif et "l'infini … d'ici-même".

Marlena Braester


mardi 13 novembre 2012

Le numéro 6 est presque bouclé et c'est cadeau...

Dans le numéro 6 de Résonance générale,
on pourra lire des textes de :


Antoine Emaz
Photo : Antoine Emaz vu par © Olivier Roller, tous droits réservés.

Fabrice Farre
Lola Nicolle
Philippe Païni
Bernard Vargaftig

Laura Vazquez
Jean-Paul Woodall 

et voir des dessins de :
Alice Popieul


On peut s'abonner pour avoir ce numéro dès sa sortie 
ou offrir un abonnement comme cadeau de Noël ou d'anniversaire ou d'amour ou d'amitié ou du jour...
C'est à cette adresse:


Un livre, un poème : D'un oeil, le monde



D'un œil, le monde

par Laurent Mourey

Avec 4 photographies de miroirs noirs "Puits de Lumière" et deux dessins "Visage" de Charlotte Hatté
Présentation de l'œuvre :
L’œil ne s’arrête pas au monde. Pas plus que le monde ne l’arrête. C’est que regarder n’a pas de fin quand voir est traversé de langage. Ainsi écrire n’a qu’un mode, l’infini d’une voix traversée. Le mode de tous les présents.
Le monde n’est alors ni un objet de contemplation, ni un lieu, pas plus qu’un séjour mais une relation inventée dans un dire. La voix est ce qui invente l’œil, d’où ce mouvement et ces trajectoires qui relèvent avant tout du rêve où chaque ligne est une veille à l’écoute de ce qui passe. De nous, en nous. Parce que cette voix est aussi de toutes celles que j’écoute, et qui m’entendent. Comme le regard est échange ou passage amoureux, où s’invente une voix-monde, voix plurielle et nombreuse, c’est-à-dire ombreuse mais jamais nombrable, et qui se meut de tous ses silences.
Cette écoute de ce qui nous travaille, de ces emportements pleins d’affects et de résonances, de ces voix pleines de corps sans lieu ni assignation, est inséparable d’une recherche d’un sens du continu dont l’écriture est la ligne. Une prose qui n’est recherche que de ce qui la continue. Le continu de ce qui t’invente. Et te découvre. Une prose continue. De je à tu.
Recueil de poèmes , 120 pages, 15 euros.
Sorti le 01/10/2012.
ISBN : 978-2-911648-54-0.
Etat : Disponible

On commande à cette adresse:
Une lecture à cette adresse:

Marseille vue par... l'écoute

Un poète et sa cité:

Cités Second Cities photo project
workshop Košice - Marseille 2011



C'est à cette adresse:


http://www.2ndcities.net/0-Cites2011/Cites2011.pdf

dimanche 26 août 2012

Les auteurs du numéro 5

Quelques renseignements sur les auteurs du numéro 5:

Caroline Sagot Duvauroux a beaucoup publié surtout chez José Corti :
http://www.jose-corti.fr/titresfrancais/VentChauleCSD.html
ou encore chez les ennemis de Paterne Berrichon :
http://www.lesennemis.com/sagot-duvauroux
Un entretien récent à cette adresse:
http://martin-ritman-biblio.blogspot.fr/2012/08/caroline-sagot-duvauroux-ou-la.html

Soaz Saahli est, entre autres, blogueuse très active; on peut trouver beaucoup de ses textes à ces adresses:
http://lalmaniakdesidonie.blogspot.fr/

Yannick Torlini est l'infatigable et énergique animateur de Tapages, le site qui bouge tous les jours avec du poème :
http://tapages.over-blog.fr/

Romain Fustier est l'animateur avec Amandine Marembert (voir le n° 4) de la revue Contre-allées.
On peut trouver des infos ici:
http://terreaciel.free.fr/poetes/rfustier.htm
Il vient de publier Mal de travers aux éditions Clarisse.

Armelle Leclercq a publié chez les amis de Contre-allées et on trouve pas mal d'infos à cette adresse : http://www.m-e-l.fr/armelle-leclercq,ec,935

Benoît Pichonnier a publié dans Comme en poésie.

Notre artiste invitée est à cette page:
http://revue-resonancegenerale.blogspot.fr/2012/06/minji-cho-lartiste-invitee-du-prochain.html





Le numéro 5 est en vente


Vite, on peut commander et acheter le numéro 5...
De nouveaux auteurs, des auteurs confirmés et qu'on aime 
et toujours deux cahiers qui résonnent
à partir du manifeste continué
s'ombrer en (géo)graphies
avec un dossier de six dessins et un traduction du coréen
puis, dans la dernière rubrique, un hommage à Bernard Vargaftig.

C'est l'occasion de s'abonner (deux numéros : 20 euros) à cette adresse:
http://www.latelierdugrandtetras.fr/



jeudi 12 juillet 2012

Lodève et Sète... l'été en poèmes





La revue Résonance générale sera présente au marché de la poésie du Festival "Voix de la Méditerranée" à Lodève, du 16 au 22 Juillet 2012, et à Sète, pour le festival "Voix vives" à Sète, du 20 au  28 Juillet, sur le stand de l'Atelier du grand Tétras.






   


http://www.voixdelamediterranee.com/


http://www.voixvivesmediterranee.com/fr/Le_Festival/Editorial.php



samedi 30 juin 2012

Quatre "Lampes de poche" pour les nuits d'été

Quatre nouveaux titres viennent de paraître aux éditions Contre-allées, au sein de la collection Lampe de poche.

  Olivier Bourdelier, A la fin dormir

venez les joies les peurs je n'ai
pas tourné la clé je n'ai
qu'un lit seul on se serrera

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Gwénola Morizur, Igrec ou bien

igrec son baromètre
si jamais le désir

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Philippe Païni, Architecture de l'orage

on mêle nos corps à tant d'eau
qu'on nage jusque dans
le feuillage des arbres

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Valérie Rouzeau, Ma ténèbre

Lune sale
Coeur net


Les couvertures des livres ont été dessinées par Loïc Gaume : http://loicgaume.blogspot.fr/

 
Les commandes sont à adresser au siège des éditions :

Contre-allées
16 rue Mizault 
03100 Montluçon

Règlement par chèque à l’ordre de « Contre-allées poétiques »

Préciser ci-dessous le ou les recueil(s) commandé(s)


Je commande
- Olivier Bourdelier, À la fin dormir    
 ……..…….….exemplaire(s) x  4 € = ………€
- Philippe Païni, Architecture de l’orage  
..………….…..exemplaire(s) x  5 € = ………€
- Valérie Rouzeau, Ma ténèbre 
……  …….……exemplaire(s) x  6 € = ………€
- Gwénola Morizur, Igrec ou bien 
.........................exemplaire(s) x 10 € = ………€

Je commande 
- Les quatre recueils  : 12
- ………. séries de 4 recueils : ………. x 12 € = ………………€
Total de la commande : …………… €


 

lundi 25 juin 2012

Minji Cho l'artiste invitée du prochain numéro de Résonance générale

Le numéro 5 de Résonance générale est sous presse. Une artiste accompagne ce numéro. En avant-première, quelques éléments biobibliographiques et un texte dont on peut apercevoir la mise en page sur quelques photographies...
Dans la revue, c'est un ensemble de six dessins sous le titre "la montagne est vide", qui attend les abonnés et les acheteurs du numéro: vite sur le site de l'éditeur pour s'abonner (20 euros) ou commander...


Min-Ji Cho, née en 1975 à Busan, Corée du Sud.
Artiste et sémiologue, Min-Ji Cho obtient en  2004 son DNSEP à l’Enba-Lyon. Son travail artistique, qui privilégie le dessin tout en utilisant différents médias (texte, vidéo, performance), s’attache à créer un espace narratif à partir d’une multiplicité de points de vue. Textes et images s’articulent et se complètent pour constituer des récits singuliers. Sa pratique se développe souvent en collaboration avec des chorégraphes et musiciens, sous forme d’improvisations. Actuellement elle travaille comme maître de langue à l’Inalco et en doctorat de Sciences du langage à l’Université Paris Descartes, elle développe ses recherches en sémiologie générale sur la notion de < vide > dans l’espace pictural dans les peintures populaires coréennes.
Elle a exposé en France et à l’étranger : à l’Espace sans frontière, (Paris, 2010) ; à la galerie On (Séoul, 2010), au Casino (Luxembourg, 2008 ); au Musée du Temps, Besançon, 2006 ; à la Villa Dutoit (Genève, 2005 ), ect.
Elle a présenté également ses textes en lecture performance : Apéritifs, Lecture -performance « Naxox Bonies»(Paris, 2012) ; Just love , Galerie Mémoire de l’avenir (Paris, 2012) ; Rdv périphérique, Centre culturel des Amandiers (2010, Paris), et ses dessins sous forme d’une édition en livre d’artiste Mon amour fantomatique, Enba (Lyon, 2009), et dans une édition collective : BD, « salon light » à point éphémère, Dasein (Paris, 2008), Catalogue d’exposition collective, 1994-2006  : Cahier #1 , Espace Croisé (Roubaix , 2007), …



  Mon amour fantomatique    

Mon amour tête de fantôme
Je t’aime
Je me vengerai
De cet amour sans fin
Qui ne se trouve
Nulle part ailleurs

Le monde se déchire
De nouveau à deux
Des plumes
Les plumes de la  nuit des ténèbres

Je t’aime mon amour
Où est ton visage
Dans ta vie natale 
Tu es de
Sans tête sauf le visage
Rien à réfléchir
Sauve ta peau

Je t’aime mon amour
Quand tu n’es pas là
(Où est là hélas)

Merde  que tu sois revenu
Merde  pour ton retour initial

Mon amour fantomatique
Je change mon visage
Mon amour
Depuis que tu m’as dévorée dans la nuit d’une fête chez ma voisine
Je suis tombée avec les ailes que tu m’as mises cette fois-ci
D’un poète qui n’est plus
Du vent de l’orage et de la pluie
Des crevettes des frites du ketchup
Je souffrais tellement
Une amie est morte dans mon assiette
Combien de cachets elle a pris pour avoir un cœur aussi fragile
De boire un verre de thé avec un crapaud de  Costa rica
Qui ne bouffe que du gingembre et du miel
Elle a déjà bu deux cocas et demi en attendant un vieux monsieur
Qui ne veut plus aller aux toilettes turques
Dans les cafés de la marine au château creux
Le parapluie s’ouvre sans un bruit porte une coccinelle
D’un  homme qui reste à la recherche des fleurs cachées
Sous la moquette qui pèse des tonnes de sable d’Osaka

                                                                                                                                                                    Min-Ji Cho, Paris, le 22 Juin 2007
                                                                                                           


mercredi 9 mai 2012

Le carnaval de James Sacré : masque & voix


James Sacré, Si les felos traversent par nos poèmes ?, éditions Jacques Brémond, 2012.


Le carnaval dans l’écriture de James Sacré vient-il pointer son bout de masque dans ce livre ? Oui, avec les belles photographies d’Emilio Arauxo, l’ami poète de Lalin en pays galicien. Et avec le carnaval, « ça s’en va comme à côté » (p. 13). Alors Sacré écrit comme « des gestes continués » (p. 15) une ethnographie de ces déambulations carnavalesques très colorées des paysans felos « pour dire on se demande à la fin quoi ? » (p. 17). Oui, il ne démêle pas vraiment comme ferait une publication ethnographique ou un catalogue photographique. C’est que depuis toujours ( ?) Sacré écrit à « la façon de ces masques » (p. 18) : on sait que le masque latin (persona) permettait de faire mieux entendre la voix de l’acteur tout en ouvrant quelque sauvagerie monstrueuse, du moins animale. « L’appareil de carnaval » et ce qui s’en suit, « marches et moments festifs qui ont sans doute cousu partout depuis toujours les gens à leurs paysages et façons d’habiter » (p. 25), Sacré le met dans son poème pour une danse, pour se « prendre en des bras d’amitié », voire pour s’effrayer (p. 27). Il ne s’agit pas de comprendre, ni le carnaval, ni le monde paysan disparaissant ou réapparaissant, ni ce désir d’y voir et d’y savoir. Et les questions suivent le carnaval des felos de Galice comme les questions ont toujours interpellé le lecteur (ou qui d'autre sous le masque du lecteur?) dans les textes de Sacré. Des invites à faire carnaval dans et par le langage, le poème avec tout ce qu’on rencontre (« séchoirs à maïs », « découpage de cochons », « une maison là-bas »…). 
Aussi je m’interroge au cœur du poème-carnaval de Sacré : son dérangement de carnaval jusque dans ses arrangements carnavalesques ne masque-t-il pas la femme du poème (« ma maladresse signe mon statut d’étranger », p. 56) dans ce carnaval d'hommes ? pour mieux entendre la voix ("Comme une sorte d'Orphée multiplié parmi tous ces animaux peints", p. 39)... d'Eurydice ?


Serge Martin

Carnaval d'Ourense en Galice (DR)

samedi 7 avril 2012

Le numéro 5 est parti chez l'éditeur...

Le prochain numéro de Résonance générale annonce son sommaire.
Pour être certain de le recevoir, il faut s'abonner...
à cette adresse :
http://www.latelierdugrandtetras.fr/resonance.php




S’OMBRER EN (GÉO)GRAPHIES



Numéro 5 – été 2012


Sommaire


Manifeste continué : s’ombrer en (géo)graphies

s’ombrer

Caroline Sagot Duvauroux
d’où (travail en cours, extraits)
Laurent Mourey où ma clarté attend que ta couleur (extraits)
Soaz Sahli l’almanach de Sidonie (extraits)
Yannick Torlini si rien
Mah Chong-gi poèmes traduits du coréen par Kim Huyn-ja

en (géo)graphies

Min Ji Cho la montagne est vide (six dessins)
Romain Fustier Chamonix (extraits de Le Monde à elle seule)
Armelle Leclercq équinoxiales II (Tokyo, 2010)
Serge Ritman nous (r)irons en Laponie
Benoît Pichonnier néons suivi de sunlight limonade

vrac

Avec Bernard Vargaftig (L.M. ; P.P. ; S.R.) ; Bernadette Engel-Roux, Aubes (Sandrine Larraburu-Bedouret) ; Yann Miralles, Jondura Jondura (S. M.) ; Henri Meschonnic, L’Obscur travaille (L. M.) ; Glossaire des notions de Éthique et politique du traduire d’Henri Meschonnic (texte et traduction de l’anglais canadien de Pier-Pascale Boulanger)

dimanche 29 janvier 2012

Avec Bernard Vargaftig, la vie sa dimension nue

Avec Bernard Vargaftig,
la vie sa dimension nue 



Le souffle entend la nuit entend
Nous sommes à nous taire ensemble
A parler silence un vol en plein ciel
Quand la parole nous brise pour nous
Enlacer encore dans demain
Ce n’est que l’enfance toutes les traces
Laissées à demain Bernard votre voix 
Emporte c’est comme d’un silence 
Continué comme d’une échappée
De toute la vie en un souffle
Ces traits en plus qu’un poème un poème
Qui fait la vie qui fait le monde
En une mémoire glissée en un cri
D’exister ces plis de voix ce désert
Nu la phrase qui prend la vie
Dans tous nos demains 




Avec Bernard Vargafig, le poème en répons

Où le temps patience et silence
Dans l’amour oriente les cris
Avec le monde passé oiseau envol

Et la lumière soudain filée 
entre une syllabe 
Nue et une


Laurent Mourey



samedi 28 janvier 2012

Contre-lettre à Bernard Vargaftig

rien ne se tait je vous entends Bernard
je vous entends et le crissement du gravier
qui fait tourner les châteaux les oiseaux tout autour
leurs cris dans l’ouïe le oui tendu
sur le ciel
entre les tours on se passe la parole
les cerises de Cerisy brillent rouges comme des bouches
on se croise dans les embrasures
on s’embrasse un peu
inquiets la pudeur à sa façon de dire
et sa façon de ne pas
mais les sous-entendus de l’amitié font la basse
continue de vivre

même le silence ce matin ne se tait pas ne peut pas se taire
un si inattendu connaître dans ses hiatus fait sourire l’étonnement
jusque dans tristes les nouvelles qui tombent
une rumeur remue de l’air rien ne meurt
disent les mains de ceux qu’on aime quand les mots
s’étranglent dans la gorge on tremble comme
le souffle tremble on sait bien
qu’une voix passe dans les voix ne se perd pas nous tient
debout cherchant notre au-devant le vivre d’un sens
qui ne fait que poindre qu’on prend
en plein visage après le virage en-haut
d’une falaise tout à coup quand le monde le monde s’ouvre

je vous entends dire l’échappée belle
le jardin de toutes nos forces creusé dans l’horreur
l’équilibre les mains nues
et cette terrible surprise dans les yeux toujours d’être là
qu’on se donne dans les regards et qu’on garde
qu’on porte vers demain vers ceux qui viennent
et qui répète pour nous que vivre n’a pas de fin le oui
de votre voix le poème demeure ce matin plus fort
que les non qui tombent tout autour de toute part c’est à lui
que pour toujours maintenant je tends l’oreille


Philippe Païni – Marseille, le 28 janvier 2012 

Bernard Vargaftig nous a laissé sa vie, ses poèmes


Bernard Vargaftig nous a laissé sa vie et son oeuvre hier, vendredi 27 janvier 2012. Un rassemblement est prévu au cimetière d'Avignon à 11 heures lundi 30 janvier. Je ne pourrai m'y rendre mais, grand poète né en 1934, Bernard Vargaftig était chaque jour dans mes lectures, mes rêves, mes écrits, mes essais. Nous avons passé des jours ensemble, à Nancy, à Oléron, à Cergy, qui resteront comme ces moments forts d'une vie sans qu'aucune nostalgie n'en enlève l'éclat: il lisait toujours ses poèmes après un repas, il parlait toujours des poèmes qui le bouleversaient, il écoutait les recherches des plus jeunes. Son oeuvre est immense: elle repose sur chaque vers, chaque mot et même sur ce qui est entre chaque mot. Aucun formalisme mais une éthique de la parole et de l'écriture, du poème comme vie tout contre le monde, les tragédies, l'amour.
Toutes mes pensées vont vers Bruna, son épouse, et vers Cécile, leur fille.


C'est la même énigme
Le désastre qu'aucune image n'emporte
La hâte avec l'éraflement pensif
L'accomplissement délié
 



Ce premier quatrain de Dans les soulèvements (1996) pour tout son poème.
Tous ses livres:
Chez moi partout, Pierre-Jean Oswald, 1967.
La Véraison, Gallimard, 1967.
Abrupte, (avec des gravures de Gudrun von Maltzan), hors-commerce, 1969.
Jables, Messidor, 1975.
Description d’une élégie, Seghers, 1975.
Éclat & Meute, action poétique, 1977.
La preuve le meurttre, La Répétition, 1977.
Orbe, Flammarion, 1980.
Et l’un l’autre Bruna Zanchi, Pierre Belfond, 1981.
L’air et avec, gravure de Guy Lozac’h, Lettres de Casse, 1981.
Cette matière, couverture de Colette Deblé, André Dimanche, 1986.
Le lieu exact ou La peinture de Colette Deblé, dessins de Colette Deblé, Passage, 1986.
Lumière qui siffle, Seghers, 1986.
Suite Fenosa, avec Bernard Noël, André Dimanche, 1987.
Orée vers l’œuvre de Jacques Clerc, Les Cahiers du Confluent, 1987.
Nancy, dessins de Colette Deblé, A Encrages &C°, 1988.
Portrait imaginaire de Jean Tortel, dessins de Colette Deblé, L’apprentypographe, 1988. 
Un gouffre ou l’image dans ce que peint Michel Steiner, lithographie de M. Steiner, La Sétérée, 1989.
Voici ou Un souffle à travers Journal du regard  de Bernard Noël, dessins de Olivier Debré, AEncrages &C°, 1990.
Ou vitesse, André Dimanche, 1991.
Une trouée vers l’été, gravures de Anne Slacik, Collodion, 1991.
Un récit, Seghers, 1991.
Une image avec l’image  in Trois états du Toi, avec Mathieu Bénézet et Bernard Noël, lithographies de Olivier Debré, La Sétérée/Jacques Clerc, 1992.
Ce fragment de souffle, burin de Louis-René Berge et musique de Jean-Yves Bosseur, André Biren, 1993.
L’Inclination, Atelier des Grames, 1994.
Distance nue, André Dimanche, 1994.Le monde le monde, André Dimanche, 1994.
Imminence dans l’œuvre de Jacques Clerc, La Sétérée, 1995.Toul, éditions Mydriase, 1996 .
Cinq poèmes pour accompagner Agathe Larpent & 3 gravures, Collodion, 1996.
Dans les soulèvements, André Dimanche, 1996.
De face, lithographies de Michel Steiner, Collodion, 1996.
Pour Adonis, collages de Jacques Clauzel, À tavers, 1997.
L’ombre si brève de l’azur, gravures de Germain Roesz, Lieux dits, 1997.
Un même silence, André Dimanche, 2000.
Craquement d’ombre, André Dimanche, 2000.Telle soudaineté, lithographies de Gérard Titus Carmel, La Sétérée, 2001.
Comme respirer, Obsidiane, 2003.
Aucune clarté n’efface, sérigraphies de Gérard Eppelé, Collodion, 2004.
Trembler comme le souffle tremble, Obsidiane, 2005.


Quelques liens pour continuer avec Bernard Vargaftig:
tous mes écrits avec Vargaftig:
http://martin-ritman-biblio.blogspot.com/2010/02/bibliographie-raisonnee-des-travaux.html
un article de dictionnaire :
http://martin-ritman-biblio.blogspot.com/2010/01/bernard-vargaftig.html
un livre écrit sur son oeuvre:
http://martin-ritman-biblio.blogspot.com/2010/01/la-poesie-dans-les-soulevement-avec.html



Serge Martin