jeudi 21 août 2014

Un livre de Laurent Mourey "où passer sa voix"

Laurent Mourey, C’est pourquoi voler, Montluçon, Contre-allées, coll. « Lampe de poche », juin 2014.


Ce n’est pas pour rien que son premier livre porte le beau titre D’un œil le monde (l’atelier du grand tétras, 2012) et voici le second : ce livre est comme tous ceux de cette belle collection « lampe de poche » des éditions Contre-allées : peu épais mais comme tous il est plein d’un gros livre : on lirait presque derrière le titre C’est pourquoi voler : c’est pourquoi voir… parce que dans la suite du premier livre, Laurent Mourey continue : « de nuit à nuit la vie s’invente / nos yeux sont le paysage / nous n’y voyons rien » : ainsi s’achève ou plutôt s’ouvre (nous ouvre) ce livre sur un « sait-on jamais », cette expression courante comme on dit couramment qui cache un non-savoir actif, une activité que ce livre – petit, ai-je dit mais gros, comme on dit de naissances à venir (« notre vie c’est naître / d’un temps où chaque temps / est le revers de l’autre ») – voudrait nous faire toucher des yeux ou plutôt des voix puisqu’il écrit : « dans ma voix toi mon imperceptible » : ce que je lis est exactement ce que me font ces lignes : « ton air de rien ta bouche » avec ses « mouvements interminables » qui « m’écrivent » : une trans-subjectivation à l’œuvre ou, pour parler tout simple et fort vrai, « des accords inconnus frisent nos têtes / un éveil du soudain qui claque un rien les battements de l’air ». Mais ce « faire ta voix dans encore encore » est à la fois l’écriture d’une énergie qui traverse, porte et commence sans cesse (« voler / vient d’abord »), et l’écriture d’une réponse à quelle question (le « c’est pourquoi ») qui en sens contraire creuserait, angoisserait même, du moins inquiéterait sans cesse (« le cœur nous remonte par le ventre // nous nous démenons de nous venir »)… mais toujours pour que voler recommence sans cesse : « de bouches aimantes deux pierres / se touchent deux corps / dans l’épaisseur le noir un passage / à mi-distance pas pour passer mais pour voir / où passer sa voix » : c’est le début du livre, le début d’un passage de voix, le début d’une lecture qui continue une écriture « pour voir / où passer sa voix ».

Serge Martin, le 21 août 2014


1 commentaire:

Unknown a dit…

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